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Une grande chanteuse vient de nous quitter...

mercredi 5 mai 2021

Madeleine Bouilllet, du Mesnil-Gilbert (50), est décédée dimanche 2 mai 2021 à l’âge de 99 ans.

Il est certains chanteurs ou chanteuses qu’on peut qualifier de compagnons de route de La Loure. Parce qu’ils ont participé à de nombreux événements de l’association, parce qu’ils détiennent un répertoire remarquable, parce qu’ils sont aussi des personnalités à part.

Madeleine, à n’en pas douter, était de ceux-là. C’est en 1999 qu’Yvon Davy est venu la rencontrer chez elle, au Mesnil-Gilbert (50), petite commune du canton de Saint-Pois, dans le sud de la Manche, en compagnie de Rachel Lemarchant. Ce fut une première rencontre mais absolument pas la dernière ! Madeleine a l’esprit vif, elle se souvient bien des chansons apprises dans son enfance, de sa grand-mère pour l’essentiel, même celles que sa maman n’aimait pas entendre chanter... Les visites se succèdent ainsi au fil des années, toujours avec le même rituel : quand on frappe à la porte, c’est Madeleine qui vient ouvrir. Louis, son mari, est un peu en retrait. Toujours souriant et posé, il contraste avec Madeleine en qui la fougue domine ! Ils sont en fait très différents mais forment un couple inséparable (ils étaient déjà ensemble sur les bancs de l’école du Mesnil-Gilbert : Louis, l’aîné, apprenait à lire à Madeleine, sa cadette). Entrés dans la cuisine, on s’installe sur la bancelle, de part et d’autre de la table avec Madeleine. Louis de son côté prend place dans son fauteuil, un peu à l’écart mais très à l’écoute. Il aime entendre chanter son épouse. Et parler aussi. Dans cette maison, c’est elle qui tient le ministère de la parole !

A l’automne 1999 est organisée la première rencontre d’automne de La Loure, à Mesnil-Gilbert justement, autour de Madeleine. Elle y fait sensation, très à l’aise devant un public. Elle participe ensuite à différentes fêtes du sirop, des premières qui se déroulent en 2000 et 2001 à Barenton jusqu’aux suivantes, à partir de 2006 à Vire. On la voit aussi dans de nombreuses veillées de La Loure où il n’est pas besoin de beaucoup la prier pour qu’elle chante. En 2007, un stage de chant est consacré à son répertoire à Vire.

Madeleine est une chanteuse bien affirmée. La voix est puissante et assurée, le timbre clair. Jusqu’à ces toutes dernières années, elle a continué à chanter même si elle disait ne plus avoir de voix. Madeleine est aussi une mémoire auprès de laquelle nous sommes allés puiser sur des sujets variés. En dernier lieu, elle a partagé ses savoirs sur la gestion des haies avec sa copine Paulette Blondel, dans le cadre de l’opération Portr’haie.

Quand Louis est décédé en 2016 (également à l’aube de ses 100 ans), elle a accusé le coup mais a tenu bon. Peu de temps après son inhumation, elle a accepté de venir intervenir avec nous dans l’école voisine de Juvigny-leTertre. A peine arrivée dans la classe de CE2, cahin caha derrière son déambulateur, elle lance d’une voix qui ne laisse pas la place au doute : "Alors qu’est-ce qu’ils connaissent comme chansons ces enfants là ? ". En à peine deux minutes, elle a conquis tout le monde. Alors qu’elle était invitée à venir transmettre ses chansons, elle renverse la proposition en mettant les enfants au même niveau qu’elle et en écoutant les chansons qu’ils avaient à lui partager. Sacrée Madeleine !

Ce personnage – car c’en était un – ne laissait pas indifférent. C’est sans doute cela qui explique que nous l’ayons sollicitée pour figurer sur la couverture du premier disque de La Loure, M’y promenant. On l’entend également chanter dans ce disque "Quand p’tit bon’homme s’en va-t-au bois". Elle apparait ensuite dans le disque L’Eglise en chansons ("Dixit Dominus") puis dans celui consacré aux répertoires du Mortainais ("Ma vaque a passé dans les choix à Durand", "A 18 ans je m’suis mariée", "Quand j’étais chez mon père"). On la retrouve aussi en 2010 dans le montage audiovisuel réalisé pour accompagner l’exposition Chanter, jouer, danser, réalisée en partenariat avec le Musée de Vire.

Répondant à des sollicitations de la télévision, nous avons aussi facilement pensé à Madeleine car elle avait un aplomb et une répartie hors du commun. Elle a ainsi été en 2002 au coeur d’un long reportage réalisé par France 2 sur l’activité de La Loure pour le compte de l’émission "Les pieds sur l’herbe" (avec deux autres chanteurs et musiciens : Georges Sexis, de Saint-Fraimbault, et Roger Mourice, de Lassy). Plus récemment, en 2019, elle apparaissait en compagnie du groupe Mes souliers sont rouges au 13h00 de Jean-Pierre Pernaud, sur TF1.

Mes Souliers Sont Rouges ont sorti un nouvel album from La Loure on Vimeo.

Avec le départ de Madeleine, nous avons un peu le sentiment d’une page qui se tourne. Elle paraissait inusable, la voici aujourd’hui partie. Nous ne vous oublierons pas Madeleine. Vos chansons vous survivent !