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Le calendrier social

jeudi 19 avril 2012

Selon les territoires, certains moments du calendrier social appellent l’expression de répertoires traditionnels spécifiques ou, du moins, sont des occasions particulières pour chanter ou danser de manière plus importante qu’à l’ordinaire.

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Juliette Soisnard, Marie Brion et Thérèse Bridet à Saint-Pierre-la-Vieille (14)

En l’espèce, si l’on passe en revue les moments forts de l’année en Bocage Virois, une première étape se situe au moment de l’Epiphanie autour des feux de taupes et mulots. Cet usage n’est pas avéré sur l’ensemble du Bocage Virois. Ces feux sont inconnus à l’ouest de Vire mais par contre encore bien présents dans la mémoire des personnes âgées dans les cantons de Condé-sur-Noireau ou d’Aunay-sur-Odon (on les retrouve également plus au nord dans le Bessin et plus au sud dans le secteur d’Athis-de-l’Orne et de Briouze).

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Les feux de taupes et mulots - raconté par Marie Brion, Juliette Soisnard et Thérèse Bridet, de Saint-Pierre-la-Vieille et Cauville (14)

On élevait ces feux au milieu des plants de pommier et les enfants couraient avec des torchères de paille (appelées coulines) en chantant en forme d’imprécation "Taupes, taupes, les mulots, sors de mon clos ou je te brûle la barbe et les os"... Des rondes étaient également faites autour de ces feux avec les mêmes paroles. Ce type de feu s’est encore pratiqué après la Libération dans plusieurs communes autour du Plessis-Grimoult.

D’autres moments du calendrier social ne présentent pas la même importance : à Mardi gras, dans certaines communes (Bures-les-Monts, Landelles-et-Coupigny, Chênedollé...) les enfants allaient, déguisés, de maisons en maisons solliciter quelques friandises. A la différence d’autres secteurs en Normandie, l’usage des quêtes du temps de Pâques (avec leur chanson rituelle) semble s’être estompé assez tôt, excepté à Saint-Vigor-des-Mézerets où nous avons recueilli le témoignage d’adultes nécessiteux venant chanter la Résurrection par les maisons au matin de Pâques en échange de quelques oeufs ou d’un peu d’argent. Les quêtes qui restent évoquées le plus souvent par les anciens du Bocage Virois sont celles qui étaient pratiquées par le bedeau (qui jouait souvent aussi le rôle de sacristain, ou de custod, dans les petites paroisses rurales) au moment de Pâques, de la Quasimodo (dimanche après Pâques), de la moisson ou de la Toussaint, pour recueillir des oeufs, des gerbes de blé (ou de sarrasin) ou encore de l’argent, en échange de son service à l’église. Elles n’étaient par contre accompagnées d’aucune chanson de demande.

Là où les témoignages convergent tous pour saluer la bonne humeur et la présence de la chanson, voire de la danse, c’est à l’occasion des battages, quand la mécanique venait dans les fermes pour battre le grain. Après une dure journée de labeur qui mobilisait facilement de 15 à 20 personnes, le repas du soir était le moment de se relâcher
et de se divertir, d’autant plus facilement que le cidre ou le calvados aidait à délier les langues ! Les soirs de batteries étaient aussi l’occasion pour des musiciens peu aguerris de s’exercer : beaucoup de joueurs d’accordéon ou d’harmonica rencontrés au cours de nos enquêtes nous ont indiqué n’avoir jamais joué que lors des mécaniques ou dans le cadre familial.

Le conseil de révision, véritable passage dans la vie adulte pour les jeunes hommes, peut aussi donner lieu à des réjouissances : de retour du chef-lieu de canton où ils ont passé tous les tests d’aptitude à la vie militaire, les conscrits démarrent une tournée qui peut durer plusieurs jours pendant laquelle ils vont porter des bouquets aux filles de leur âge et se faire offrir à boire dans les diverses maisons de la commune.

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La polka oui ça m’va - jouée à l’accordéon diatonique par Eugène Hardy, de Landelles-et-Coupigny (14)

Un musicien est souvent sollicité pour les accompagner : Eugène Hardy a ainsi suivi avec son accordéon diatonique les conscrits de la classe 1948, huit jours durant, à Landelles-et-Coupigny.

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Noce Bécherel à Saint-Germain-de-Tallevende, années 1920-1930. Joueur d’accordéon inconnu. Coll. part.jpg

Dans ces moments charnières de la vie, les noces prennent un relief tout particulier : elles sont citées d’évidence dès qu’il est question de la chanson ou de la danse. Avant la seconde guerre mondiale (moins systématiquement après), un musicien est embauché et anime souvent la noce d’un bout à l’autre. A défaut, la noce se rend entre les repas du midi et du soir dans un café du secteur pour y danser. A table, chacun des convives est sollicité pour pousser la chansonnette, même s’il est un piètre chanteur.

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Communion à Saint-Pierre-la-Vieille vers 1942-43. Coll. part.

Les baptêmes, communions et confirmations sont à classer au même titre, au rang des fêtes de famille au cours desquelles il est d’usage de chanter, plus rarement de danser, sauf s’il y a un musicien dans l’assemblée.